[CIR] le crédit impôt recherche, levier toujours aussi séduisant pour les entreprises françaises – présentation et analyse des statistiques provisoires pour le CIR 2018

Le Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (MESRI) a publié mi-décembre 2020 les statistiques du crédit impôt recherche (CIR) 2018 [1].

Voici ce qu’il faut en retenir.

Le CIR, toujours aussi plébiscité (en 2018 du moins)

Avec plus de 26 000 sociétés déclarantes, un chiffre stable depuis 2014, le CIR démontre une nouvelle fois son intérêt pour les entreprises qui investissent en Recherche & Développement. La créance pour l’Etat s’élève désormais à 6,81 Md€ en 2018 (chiffre provisoire) avec un taux de croissance annuel moyen autour de 3% depuis 2010 et couvre à 94% les dépenses de R&D (Figure 1).

En répartition des postes de dépenses, les dépenses de personnel constituent le volet majeur de cette créance (plus de 80%), suivie de loin par les dépenses de R&D sous-traitées. C’est cet aspect du dispositif qui contribue à rendre le chercheur Français compétitif, comme le souligne chaque année l’ANRT [2].

Du point de vue sectoriel, le CIR est toujours principalement distribué aux industries manufacturières (60,9% de la créance), avec le quatuor de tête invariablement composé d’année en année par « l’industrie électrique et électronique », la « pharmacie, parfumerie et entretien », « l’industrie automobile » et la « construction navale, aéronautique et ferroviaire ».

Géographiquement, le CIR apparaît fortement centralisé puisque l’Ile-de-France truste 64,6% de la créance, loin devant l’Auvergne-Rhône-Alpes (10,0 %) et l’Occitanie (6,2 %).

Du point de vue structurel, la créance de CIR est équitablement répartie entre PMEs et ETIs (1,8 Md€ chacune). Les grandes entreprises se détachent avec près de 3,0 Md€ de créance (Figure 2). Seules 28 groupes de sociétés dépassent le seuil de 100 M€ de dépenses de R&D, emportant à eux seuls 27% de la créance de CIR.

A noter que bien qu’il soit plébiscité en 2018, le CIR a été récemment raboté, d’une part avec l’abaissement des frais de fonctionnement sur le personnel de recherche de 50% à 43 % en 2020, mais également avec la future suppression du doublement des dépenses de sous-traitance publique en 2022 (loi de finance 2021).

Un point négatif pour la compétitivité qu’a récemment mis en avant l’ARNT dans son étude-panel sur le cours du chercheur 2020 et dont notre analyse est à retrouver ici [2]. De plus, l’année 2020 aura été marquée par la pandémie de COVID-19 avec un fort impact sur les activités industrielles (recours au chômage partiel, baisse des budgets de R&D). Nul doute que nous allons voir cette belle progression s’infléchir d’ici à 2022.

Les dépenses d’Innovation, lentement mais sûrement

La créance de Crédit Impôt Innovation (CII) progresse de 0,7% par rapport à 2017 et a doublé par rapport à 2014. En tout, ce sont près de 1 000 entreprises de plus qu’en 2017 (8 106 vs 7 160) qui ont fait appel à ce dispositif.

Faits marquants par rapport au CIR :

  • la répartition sectorielle des déclarants de CII va vers les entreprises de services (74,5% de la créance) et non aux Industries manufacturières. Parmi les entreprises de Services, ce sont principalement les entreprises de « conseil et assistance en informatique » qui emportent 43,5% de la créance.
  • Géographiquement, le CII est nettement plus réparti sur le territoire que ne l’est le CIR, avec « seulement » 38 % de la créance en IDF, contre 16,2 % en Auvergne-Rhône-Alpes.

Rappelons que ce dispositif est réservé aux PMEs pour leur permettre, une fois la R&D achevée, de booster le time-to-market de leurs nouveaux produits.

Son maintien est régulièrement questionné par les parlementaires ; une évaluation est d’ailleurs prévue pour statuer sur sa reconduction après le 31 décembre 2022 (article 29 de la loi de finances 2020). Sa progression, certes modérée, est tout de même révélatrice de l’intérêt qu’il présente pour les entreprises. Verrons-nous ce point parmi les mesures d’économies publiques prévues par le gouvernement ?

Les dépenses de collection en baisse en 2018, remonteront-elles sur les prochaines années grâce à la relocalisation progressive de l’industrie textile dans notre pays ?

Nous sommes ici en 2018, la créance de crédit d’impôt sur les dépenses de collection s’élève à 36 M€, soit une baisse de 5 M€ en comparaison avec 2017 et de 16 M€ en comparaison avec 2016. Une tendance à la baisse engagée il y a plusieurs années, et qui traduit peut-être une défiance dans le dispositif, étant donné les nombreux arrêts en défaveur des sociétés depuis plusieurs années (dispositif réservé aux sociétés industrielles).

La crise de la COVID-19 a rebattu les cartes de l’industrie manufacturière textile et l’essor du made in France est au cœur de la stratégie des PMEs du secteur. La France est en capacité d’investir dans l’outil de production sur le textile technique et le luxe, en misant sur l’Innovation [3]. La tendance va-t-elle s’inverser en 2021 ?

Note : cet article présente une synthèse des données du crédit d’impôt recherche basées sur les déclarations fiscales des entreprises relatives à leurs dépenses réalisées en 2018. Ces données sont extraites de la base de gestion du CIR, GECIR [1] et sont à considérer comme provisoires étant donné que les modifications éventuelles suite à un contrôle fiscal ne sont pas prises en compte.

Sources :

[1] https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/cid49931/cir-les-statistiques.html, se référer au fichier PDF Le crédit impôt recherche en 2018 – provisoire (https://cache.media.enseignementsup-recherche.gouv.fr/file/Chiffres_CIR/11/5/Publi_courte_CIR2018prov_en_ligne_1362115.pdf) et au fichier Excel Données détaillées CIR 2018 – provisoire

 [2] http://www.financeinnovation.fr/2021/01/13/cir-comparaison-annuelle-internationale-du-cours-du-chercheur-par-lanrt-la-france-toujours-aussi-attractive-mais-fragilisee/

[3] https://www.usinenouvelle.com/editorial/les-premieres-propositions-de-la-filiere-textile-francaise-pour-relocaliser-sa-production.N973066