La recherche française à la pointe des innovations sur l’hydrogène : Le début d’un leadership tricolore ?

R&D Hydrogène : une décennie de montée en puissance pour les instituts de recherche français

L’hydrogène prend une place de plus en plus importante dans la recherche « verte » française, comme le montre l’étude rapportée ci-dessous. La réflexion sur le verdissement de l’industrie à l’échelle nationale est d’ailleurs plus large puisque depuis 2022, le sujet de verdir le crédit impôt recherche est également sur la table. 

Publiée ce 10 janvier, l’étude conjointe de l’OEB (Office Européen des Brevets) et de l’AIE (Agence Internationale de l’Energie) annonçait la présence de 3 organismes de recherche français au sommet du classement mondial des innovations sur l’hydrogène sur la période 2011-2020. (catégorie « Research ») Ce dernier, établi sur la base du nombre de brevets déposés place donc le CEA (Commissariat à l’Energie Atomique) à la tête du classement des organismes publics, avec pas moins de 159 FBI (Familles de Brevet Internationales : désigne une innovation ayant fait l’objet d’une demande de brevet sur 2 territoires ou plus) en 9 ans. La majorité d’entre elles (127) se trouvent dans la catégorie « Motivated by climate ». 

Il est talonné par l’IFPEN avec près de 121 FBI, dont 53 appartiennent à la catégorie « Established technologies ». Le CNRS se place en troisième position, avec 60 FBI majoritairement orientés climat (52). 

Il est aussi utile de noter que si l’on inclue les acteurs privés français à ce classement, Air Liquide prend la tête avec pas moins de 401 FBI. L’entreprise est toutefois devancée à l’international par Toyota et ses 750 FBI. L’entreprise française est première dans la catégorie « Established technologies » à l’échelle mondiale, avec 286 FBI de ce type.  

Cette prédominance française vient s’inscrire dans un contexte de course à l’innovation nationale, alors que le nombre de familles de brevet hydrogène a doublé en 20 ans dans l’Hexagone, (passant de 476 FBI entre 2001-2010 à 890 en 2011-2020). Le pays est désormais le deuxième innovateur européen dans ce domaine (6% des brevets à l’échelle mondiale), derrière l’Allemagne (11%) et devant les Pays-Bas. (3%) Si le secteur privé semble produire le plus grand nombre de ces brevets, les universités et instituts de recherche publics ne sont pas en reste avec près de 13% des FBI liés à l’hydrogènes produits entre 2011 et 2020. Ce sont donc des acteurs à suivre de près.  

Figure 1 Les dix principaux organismes de recherche sur les technologies de l’hydrogène. (FBI, 2011-2020) 
Source : rapport OEB-AIE, p.35 
Une croissance due à un nouveau contexte national …

Cette montée en puissance de l’innovation française s’inscrit aussi dans un contexte très favorable envers les innovations à faibles émissions : à l’échelle internationale, la catégorie « Motivated by climate » a généré deux fois plus de brevets que les « Established technologies ». Les effets de la crise climatique se sont fait ressentir en France, avec une augmentation de 5,7% de brevets hydrogènes « Motivated by climate » sur la période 2011-2020 (contre 4,4% pour les « Established technologies »).  

Autre raison expliquant ce phénomène : les investissements massifs de la France dans les startups du domaine hydrogène, estimés à hauteur de 65,5 M€. Ces investissements ont eu pour destination 18 startups dépositaires de brevets recensées entre 2011 et 2020.  

Mais la France se démarque aussi par le poids de ses villes : Paris, (2,8% des FBI à échelle internationale (432) et une croissance de 9% sur la période 2011-2018). La ville est 6ème au classement mondial des clusters d’innovation hydrogène. Cette concentration spatiale s’explique par la présence d’entreprises ou d’instituts d’importance au sein de clusters français (Air Liquide, IFPEN, CNRS et CEA). 

… mais à relativiser à l’échelle internationale ?

Malgré cette montée en puissance, la France est encore loin des géants que sont le Japon (24% des FBI hydrogène) et les USA (20%, malgré une baisse des demandes internationales de brevet liés à l’hydrogène. Cela peut s’expliquer par des investissements dans d’autres types de technologies) A titre de comparaison, l’Union Européenne représente 28% des FBI déposés au cours de la dernière décennie.  

D’autres pays sont aussi à considérer comme des acteurs importants du milieu : la Chine et la Corée du Sud sont déjà vus comme des pôles de compétitivité hydrogène, surtout après leur récente progression en termes de production de FBI. D’autres pays pourraient aussi se positionner comme de futurs acteurs importants : Royaume-Uni, Suisse, Canada, etc…  

Figure 2 Evolution de l’activité de brevetage hydrogène dans les 5 régions principales (FBI, 2001-2020) 
Source : rapport OEB-AIE, p.27